Il y a maintenant plus de deux semaines, j’ai commencé à travailler dans une ferme de citrons jaunes et de citrons verts. Même si le fruit picking ne fait pas spécialement rêver et est vu comme un dur passage afin de compléter les 88 jours de travail en ferme, j’adore ce job ! Rassemblant rencontres géniales, bavardages toute la journée et ambiance de folie dans les rangs, comment ne pas apprécier ?
Le picking
Selon les méthodes employées par le fermier et la hauteur des arbres, le picking de citrons peut se faire autant avec un cherry picker qu’à la main. De mon côté, tout est cueilli à la main à mon plus grand bonheur. Nous avons un joey bag (un sac bébé-kangourou) sur le ventre qu’on peut remplir d’une cinquantaine de citrons avant de le vider dans une benne de 1000 L. Le job n’est alors pas très compliqué. C’est comme faire les vendanges, mais sans se casser le dos. N’est-ce pas génial ?
Ce qui est un peu plus dur à supporter est la chaleur. Le Queensland est un état très humide, ce qui augmente la sensation de chaleur. Pour 33 degrés, le ressenti est de 42 et l’humidité peut s’élever jusqu’à 95 %. Il faut alors boire constamment parce qu’on se déshydrate sans même s’en rendre compte. Le fermier refuse que les personnes sans eau, sans chapeau ou même sans crème solaire, travaillent. Il a nous confiés que chaque année, des dizaines de picker finissaient aux urgences ou mourraient dans les champs à cause de ce climat si spécial.
Monstres et horreurs
Lorsqu’on pense à du fruit picking, l’image de grosses araignées terrifiantes se cachant sous les feuilles des arbres ou des énormes serpents se baladant dans les herbes hautes nous saute directement à l’esprit. À mon grand regret, Je n’ai pas vu tant de terribles bêtes. J’ai tout de même appris par la suite que les crapauds australiens peuvent être mortels par les bactéries recouvrant leur peau. Rien que les toucher peut alors être fatal. Y a-t-il un animal dans ce pays qui n’a pas l’envie ou la possibilité de nous tuer ?
J’ai aussi découvert un étrange insecte se nourrissant de particules sur la peau des citrons. Je pensais au début que c’était de la moisissure. Puis en m’approchant, j’ai observé des petites pattes et une tête ressortir de cette carapace mousseuse. C’est un papillon appelé la cicadelle blanche. Enfin, il va se transformer en papillon par la suite. C’est tout de même une bestiole très bizarre.
Mon cœur s’est néanmoins emballé lorsque je me suis retrouvée nez à nez avec un python ! Il ondulait de tout son corps sur les branches du citronnier avant de se rouler en boule et de s’assoupir sous la fraicheur du petit arbre. Il n’est pas venimeux, mais il tue ses proies en les étouffant. Charmant, n’est-ce pas ?
Une ambiance festive
Nos chefs et collègues sont des Fidjiens venant faire les saisons de citron depuis plusieurs années maintenant. Je me suis bien vite rendue compte que la population fidjienne ne devait pas être reconnue ni pour son efficacité ni pour sa motivation. En revanche, on ne peut pas leur enlever leur sens de l’humour et du divertissement.
Certains s’amusent à se faire peur en se cachant derrière les arbres. D’autres mangent plus les citrons qu’ils n’en cueillent. On prend évidemment des pauses de 30 min à 1 h parce que, je cite : « il ne faut pas trop se fatiguer ». De la musique fidjienne enrobe le silence régnant dans la nature. Les discussions partent de pâtes bolognaises et finissent en « Si un zombie mord un vampire, penses-tu que le zombie se transforme en vampire ou que le vampire se transforme en zombie ? ». On pourrait se poser la question alors je vous confirme bel et bien que je ne suis pas en colonie de vacances, mais bien au travail.
Après tout, qui a dit que le travail en ferme devait forcément être synonyme de souffrance et de désespoir ?
De l'arbre à l'assiette
Après avoir été cueilli encore verts et pas mûrs, les citrons jaunes sont placés dans une chambre froide pendant 1 à 2 jours. Une particule chimique les recouvre permettant à ces derniers de prendre leur couleur jaune. Évidemment, ils deviendraient aussi jaunes en murissant sur l’arbre, mais ils devraient alors être consommés dans les jours à venir et ne pourraient pas voyager dans le monde. Les citrons que l’on cueille sont envoyés à Singapour, au Japon, mais aussi en Chine et en Nouvelle-Zélande.
Pour ce qui est des citrons vers, ils sont emballés sur place et sont directement envoyés à l’étranger ou dans les supermarchés australiens.